Sciences et société
De la fermeture des remontées mécaniques au changement de cap attendu
Alors que le débat autour de la fermeture des remontées mécaniques dans les stations de ski françaises à Noël bat son plein, Emmanuelle George, ingénieure-chercheuse à l’Inrae, membre du Labex ITTEM et spécialiste des questions liées au tourisme de montagne, était l’invitée de France Bleu Isère ce matin.
En préambule, Emmanuelle George a rappelé que pour les opérateurs de domaines skiables, « la période de Noël représente 15 à 20% de leur activité totale sur la saison », expliquant la « stupeur » non seulement de ces opérateurs, mais également des collectivités locales, et plus largement de l’ensemble de l’« écosystème » des stations, englobant une multitude d’acteurs.
« A court-terme, l’enjeu est de savoir si les stations seront en capacité d’accueillir correctement les clients qui viendront, en leur proposant une offre d’expériences et de séjours intéressante », explique la chercheuse. Elle rappelle qu’un certain nombre de stations et de territoires de montagne ont déjà investi, souvent avec le soutien de politiques publiques, dans une offre touristique diversifiée permettant d’élargir le panel d’activités et de prestations proposées. Mais la dépendance à l’activité « ski » reste variable d’une station à l’autre.
Paradoxalement, les stations de moyenne montagne, généralement plus vulnérables compte tenu de l’enneigement aléatoire, pourraient avoir une longueur d’avance dans cette situation inédite. C’est aussi ce que note Philippe Bourdeau, cooordinateur du Labex ITTEM, interrogé par le journaliste François Carrel pour Libération (Stations fermées. En montagne, le virage de l’après-ski, 28 et 29 novembre 2020). Il évoque un « pied de nez de l’histoire, une inversion subite : les grandes stations qui se prévalaient jusque-là de leur clientèle internationale et de leur solidité risquent d’être les plus fragilisées par cette crise. Les stations de moyenne altitude, qui ont déjà diversifié leurs activités et s’appuient sur une clientèle régionale, ont au contraire des marges de manœuvre ».
La crise sanitaire qui impose aujourd’hui la fermeture des remontées mécaniques va-t-elle rebattre les cartes du tourisme en montagne ? Au-delà des impacts économiques et financiers à venir, Emmanuelle George note qu’il y a « toute une réflexion à mener pour ces stations en terme de modèle de transition, chacune devant définir et spécifier sa trajectoire d’évolution propre », pour compléter l’activité « ski » d’une offre touristique plus variée et mettre en avant d’autres activités économiques, comme l’agriculture ou l’artisanat. Cette question fait l’objet de ses travaux de recherche conduits dans le cadre du projet Tandem, au sein du Labex ITTEM.